Jacky Lezin tableau Made in Breizh

MADE IN BREIZH

de Jacky Lézin

Il est entendu que Jacky Lézin n’aimait pas dater ses tableaux : un gage de liberté, afin de les reprendre un jour, si besoin… Mais, dans le cas de l’iconique Made in Breizh, titré en minuscules par souci d’équilibre, on sait au moins à quelle époque il fut révélé au public. On peut même préciser le lieu : la galerie du Sallé, à Quimper, en 1986. Galerie tenue par Gwénaël et Geneviève Le Berre, à l’ombre d’une cathédrale majestueuse qui a tant veillé sur la confrérie féconde des Seiz Breur.
Jacky Lézin, né en 1940, en était-il ? Non. Mais, en fils prodigue et prodige, il s’était passionné pour cette aventure artistique si importante dans la modernisation des coutumes bretonnes. Aussi, lorsque la communicante Danièle Novello-Floc’hlay décida, en 1984, avec le soutien d’Alexis Gourvennec, de lancer officiellement le label « Made in Breizh », aussi Jacky Lézin choisit-il de créer une œuvre éponyme. Œuvre iconique, on l’a dit. Œuvre inattendue, vibrante, riante, où la casserole des Trente Glorieuses voisine avec le souffle d’une bombarde, où le fard de Marilyn tutoie la vieille coiffe paysanne. Œuvre muséale, enfin. Elle est la première à faire entrer le pop art dans la tradition bretonne. Sauf à penser que c’est la tradition bretonne qui est venue célébrer le pop art…
On se reprocherait de ne pas le rappeler : Jacky Lézin, foudroyé par une crise cardiaque en 1995, demeure dans l’histoire de l’art comme le seul peintre breton reçu dans le prestigieux dictionnaire de la Figuration narrative. En d’autres termes, le seul artiste ayant développé, à la pointe ouest de l’Europe, la philosophie et les codes colorés d’un groupe polymorphe, qui rassemblait Klasen, Erró, Adami, Arroyo, Télémaque, Rancillac, Monory, Fromanger sur le pont.
Très remarquables compagnons ! On dira d’eux ce qu’en a dit l’historien de l’art Gérard Gassiot-Talabot : qu’ils « ont senti la nécessité de rendre compte d’une réalité quotidienne de plus en plus complexe et riche, qui mêlât les jeux de la cité, les objets sacrés d’une civilisation vouée au culte des biens de consommation. » Dans son Made in Breizh, Jacky Lézin leur fait écho. Il raconte la Bretagne d’hier, devenue celle d’aujourd’hui. Il la devine menacée. Il la montre en recherche. En quête face à un grand vide, face à un grand blanc…

Chef-d’œuvre !

 Christophe Penot